Germaine L’HERBIER-MONTAGNON
(1895-1986)
Grande Dame de l’Aviation
Germaine
l’HERBIER-MONTAGNON, « Infirmière Pilote Secouristes de l’Air », les
fameuses I.P.S.A. de la Section « Aviation » de la Croix-Rouge française,
pilote elle-même, a consacré sa vie à la mémoire des pilotes français et alliés
du conflit de 1939-1945.
Dès
la fin de la bataille de France elle commença avec une petite équipe à
rechercher les avions français abattus et à identifier les dépouilles de leurs
équipages. Avant l’invasion de la zone libre, en novembre 1942, elle avait
retrouvé près de 300 avions français et identifié près de 430 aviateurs. À la
Libération plus de 200 rapports concernant des avions britanniques abattus sur
le sol français, que son équipe avait établis et conservés clandestinement,
furent remis aux autorités de Grande Bretagne. Ces résultats spectaculaires
incitèrent le chef d'état-major général de l'Armée de l'Air, le général Martial
VALIN, à lui confier la mission de rechercher, tant en France, qu’en Belgique,
au Pays-Bas, en Allemagne et en Italie, les 530 aviateurs français encore
portés disparus. Elle en retrouva et en identifia près de 460. Elle avait mené
plus de 800 enquêtes quand en 1948 sa mission fut considérée comme terminée.
Recherches
menées par Geneviève L’HERBIER-MONTAGNON et son équipe d’I.P.S.A.
Douée
pour l’écriture, elle lui consacré quelques ouvrages exceptionnels, relatant
les recherches entreprises pour retrouver pendant le conflit la trace des
pilotes disparus ou le destin souvent tragique des aviateurs qui à partir de
1940 rejoignirent le Général de Gaulle pour s’engager dans les F.A.F.L. (Forces
Aériennes Françaises Libres).
Son
œuvre littéraire, aussi consacrée à l’histoire de sa région natale, l’Ardèche,
a été récompensée par plusieurs prix.
Décret du 22 juillet 1946
portant nomination dans l’ordre national de la Légion d'honneur.
Par décret en date du 22
juillet 1946, est nommée dans
l’ordre national de la Légion d'honneur:
Au grade de chevalier.
L'HERBIER (Germaine),
infirmière pilote secouriste de l'air : directrice du service des
infirmières pilotes secouristes de l'air, s'est d'abord consacrée aux
prisonniers. Dès août 1940, a créé la mission de recherches des morts et disparus
de l'armée. A la tête de cette mission, a déployé pendant cinq ans une
incessante activité bénévole au profit de l'aviation. Avec une ardeur
inlassable, malgré les risques courus, a surmonté une à une les difficultés
rencontrées. Après avoir parcouru plus de 100.000 kilomètres en France, en
Belgique et en Hollande, a réussi à retrouver et à identifier près de 500
aviateurs français et 1 300 aviateurs alliés. Accréditée dès la Libération
pour continuer la recherche des aviateurs sur les territoires ennemis ou
occupés, a retrouvé trace de 380 aviateurs français et de 950 aviateurs alliés.
Magnifique exemple de courage, de volonté et de dévouement.
18 août
1946
Le général
JUIN remet la Légion d’Honneur à Germaine L’HERBIER-MONTAGNON
Biographie
La
biographie de référence de Germaine l’HERBIER-MONTAGNON a été écrite par
M. Vincent LEMAIRE sur son blog « Mémoire d'Ailes » : voir
les liens ci-dessous :
« Germaine
L’Herbier-Montagnon, missionnaire de l’air»
Bibliographie
GERMAINE L'HERBIER
Notions de NAVIGATION ET
MÉTEO
Librairie des sciences aéronautique,
F. Louis Vivien, 1939.
GERMAINE L'HERBIER-MONTAGNON
DISPARUS DANS LE CIEL
FASQUELLE, 1942
Prix MONTYON de l'Académie Française, séance du 29
juin 1944.
LA COURONNE T'ATTEND
FASQUELLE, 1946.
CAP SANS RETOUR
SOLAR, 1948.
Prix Louis MILLER, de l'Académie française
Prix Émile HINZELIN, de la Société des gens de
lettres
VOS FILS
MARAVAL, 1958.
JUSQU'AU SACRIFICE
E.C.LA.I.R 1960.
Prix Maria STAR, Société des gens de lettres
CAP SUR UNE ÉTOILE, vie et
mort héroïque d'Arlette Yolande Claude (1911-1944)
SUBERVIE, 1961.
Quelques étapes de la vie de
Claude FAURIEL
Bulletin du Vieux St-Etienne,
1965
UN HÉROS DAUPHINOIS ROI DE
L'AIR -ADOLPHE PÉGOUD - 1889-1915
A compte d’auteur, 1980.
GERMAINE PEYRON-MONTAGNON
LES TROIS FRÈRES DE
TOURNON-SIMIANE AU SERVICE DE L'EMPIRE
Bulletin de la Société
d'Archéologie et de Statistique de la Drôme, 1969.
UNE FAMILLE MILITAIRE :
Les CHARRAS
« L'Association des amis
du Buis et des Baronnies », 1970.
UN DAUPHINOIS OTAGE DE LA COMMUNE :
LE PRÉSIDENT BONJEAN -1804-1871
S. O. R. E. P. I., Valence,
Juillet 1973.
FRANÇOIS 1ER ET SA
FAMILLE. LE DAUPHIN FRANÇOIS MORT À TOURNON - 1518‑1536
SOREPI Valence, Mai 1975
CINQ MAISONS ADOSSÉES À
L'ÉGLISE SAINT-JULIEN DE TOURNON
Impressions Modernes 1977.
CHRONIQUE DE L'ÉGLISE ET
PAROISSE SAINT-JULIEN DE TOURNON 1300-1900 Tome I. Impressions Modernes,
1978.
GRANDS NOTABLES DU PREMIER
EMPIRE : NOTICES DE BIOGRAPHIE SOCIALE, ARDÈCHE
(CNRS), 1978
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NAVIGATION ET MÉTÉ0 A l'usage des Benjamins de l'air |
DISPARUS DANS LE CIEL Souvenirs de la mission de recherche des morts et disparus
de l'Armée de l'air. Le destin de près de 390 aviateurs tués pendant la Campagne
de France |
LA COURONNE T’ATTEND La recherche des derniers aviateurs disparus de 1940, ceux
de la Résistance et de la France libre. Les rencontres avec les familles. |
|
Vos
fils Introduction de Mme
la Maréchale Leclerc Imprimerie Maraval Saint-Pons (Hérault) août 1958 |
|
Ouvrage numérisé en févier 2014 (FXB) Cliquez sur la couverture ci-dessus (texte) |
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CAP SANS RETOUR Mémorial des premiers aviateurs des Forces
Aériennes Françaises Libres (F.A.F.L.). Préface du Colonel POUYADE,
Commandant du groupe de chasse « Normandie-Niemen ». |
VOS FILS |
JUSQU’AU SACRIFICE L'histoire
des "I.P.S.A.", Infirmières Pilotes Secouristes de l'Air. Préface
de |
« DISPARUS DANS LE CIEL »
(1)
A la recherche des morts
de l'aviation (1940)
Recension parue le lundi 15
février 1943 dans « La Croix »
La Croix-Rouge naquit de
la réaction généreuse qu'éprouva, devant l'horreur du champ de bataille de
Solferino, un jeune commerçant genevois, Henry Dunant. Depuis 1864 cet
organisme international dont les couleurs, celles de la Suisse, mais
interverties, sont, émouvante coïncidence, une croix sanglante sur fond blanc
est intervenu partout où il y avait le droit à faire respecter, des misères à
soulager, du bien à faire, des cœurs à consoler « Inter arma caritas... ».
Quand, après l'ouragan de
mai-juin 1940, la guerre eut cessé sur notre sol, une femme au grand cœur, Mme
Germaine L'Herbier-Montagnon, entreprit, seule, sans appui, du moins immédiat,
avec un dévouement inlassable qui la conduisit - ayant parcouru sur nos routes
du Nord et de l'Est plusieurs milliers de kilomètres - à travers les bois, les
champs, la neige et le froid, la recherche des appareils et des corps des
aviateurs tués au cours de la rapide mais sanglante bataille de France.
Mme L'Herbier appartenait
au groupe des infirmières-pilotes et secouristes de l'air - I. P. S. A. - fondé
avec le concours des sociétés de Croix-Rouge. Aidée par Mme Dubonnet, pilotée
par la princesse Jérôme Murat, elle ne recula ni devant la distance, ni devant
la température, ni devant les difficultés de tous ordres. et se rendit en
automobile dans le Nord, en Belgique, en Hollande, s'enquérant pieusement des
moindres indices permettant l'identification des restes des pilotes, des
navigateurs, des mitrailleurs tombés la plupart avec leur avion aux ailes
brisées, et carbonisés.
Ses efforts, ses peines,
ses démarches, ses fatigues et leurs résultats Mme L'Herbier les a consignés
dans un ouvrage dont, dans la préface, le général Chambe a pu dire qu'il est «
une œuvre d'action, et la plus pure qui soit ». II fallait toute la généreuse
ardeur, toute la piété d'un cœur de femme et de mère pour mener à bien cette
tâche pénible, pour rechercher parmi les débris des appareils les numéros et
pièces permettant la reconnaissance de l'avion : pour recueillir maternellement
les alliances, les boutons, les pauvres reliques reconnaissables parmi les
ossements calcinés ; pour assister sans frémir aux exhumations et procéder à
l'ensevelissement. Mme L'Herbier le fit, simplement, en hommage aux aviateurs
tombés, comme leur grand prédécesseur Guynemer, « en plein ciel de gloire », et
en union de coeur et d'âme avec les mères et les épouses qui cherchaient
désespérément à savoir quel avait été le sort d'un être aimé, tout en redoutant
le moment où elles sauraient, à n'en pouvoir plus douter, que l'enfant ou le
mari tant chéri était disparu en plein ciel et qu'il ne reviendrait plus
jamais.
Atroces journées de mai
et juin. Grande pitié des 100 000 morts de !a guerre de 1940... Partout des
épaves dans les champs et aux bords des routes : tanks écrasés autos et
charrettes brûlées ou basculées dans les fossés, armes et équipements
abandonnés... maisons écroulées, villages déserts, animaux errants. Une
abominable odeur de cadavre empestait l'atmosphère. Des morts partout,
militaires et civils... Quel serrement de cœur devant une petite photographie
publiée dans le volume : dans le fossé, au bord d'une route droite, une tombe,
une croix, une planche portant ces mots poignants : « Une femme et un enfant
inconnus », et, pendant à l'un des bras de la croix, le petit ours en peluche
avec lequel jouait le petit quand la bombe fit son œuvre. Indicible calvaire
des mères fuyant la mort !... Mais la mort était plus rapide...
Il fallait faire vite,
inhumer au plus tôt ces restes qui étaient déjà devenus, sous le soleil de
l'été, « ce je ne sais quoi qui n'a de nom dans aucune langue ». On se servit
comme tombes, de cavités toutes prêtes : trous d'obus, de fossés. On enterra
souvent pêle-mêle civils et militaires, et même des chevaux. En cette période
de désarroi et de panique, que de papiers d'identité non recueillis ou volés,
que de tombes non signalées ! Dans certains hôpitaux les cadavres furent
abandonnés sur les lits ou à la morgue. Le 14 mai, à Tergnier, les trains de
permissionnaires furent cruellement bombardés. Les morts apportés au cimetière
de La Fère, à Beautor, furent entassés sous un hangar qui, lui-même, atteint
par une bombe incendiaire, flamba. Des cadavres furent carbonisés. Leurs restes
furent inhumés en fosse commune. Creil vécut un dimanche d'épouvante ; le 9
juin 1940, vers 15 heures, un bombardement aérien écrasa la vieille ville. Pour
se protéger, des centaines de militaires et de civils s'entassèrent dans un
grand magasin, « Au bon diable ». On baissa le rideau de fer pour parer les
éclats, une bombe incendiaire tomba sur l'immeuble, on essaya vainement d'ouvrir
les issues; tout flamba, et tous moururent prisonniers dans la fournaise, avec
des hurlements affreux. En juillet seulement on déblayait les décombres, d'où
se dégageait une atroce odeur...
Il était ainsi très
difficile, parfois impossible, d'identifier ces morts. Plus difficile encore de
retrouver et de mettre un nom sur les pauvres ossements des aviateurs ensevelis
à la hâte ou demeurés enfermés dans la carcasse de leur appareil brûlé. La plus
grande confusion régnait. Un tel était-il prisonnier ? • « Disparu »... cela
signifiait, pour la famille, qu'il fallait attendre dans l'angoisse et sans
certitude. Mme L'Herbier entreprit la tâche immense de repérer les points de
chute des avions ou des aviateurs tombés en parachute. Grâce a ses
connaissances particulières d'aviatrice, à son cran, à sa ténacité, elle
réussit dans la majorité des cas à replacer un nom sur les ossements de ses
amis de l'armée de l'air, tués au cours de combats acharnés où leur courage
s'efforçait de pallier leur infériorité numérique Elle fut aidée par la bonne
volonté des voisins des lieux où les appareils s'étaient écrasés, des maires,
des gendarmes, des gardes champêtres, des curés - tels l'abbé Hubert, curé de
Sauville (Ardennes), l'abbé Serpette, à Cantigny, l'abbé Bonduaux, à Zuydcoote
(Belgique) qui avaient soigneusement conservé tout ce qui pourrait permettre
une identification. Souvent pourtant, dans le Nord, dans les Ardennes, dans
l'Aisne, en Belgique, les habitants avaient quitté leur demeure au moment de
l'exode. Nul parfois n'avait été témoin de l'écrasement. Il fallait alors
examiner les carcasses d'appareil, en déceler le type, vérifier grâce aux
documents envoyés par le ministère de l'air la composition des équipages,
procéder par déduction, par recoupements. Imagine-t-on l'importance de l'œuvre
réalisée par cette femme, luttant seule pour sauver de l'anonymat de la mort
ceux qui avaient lutté, dans le ciel, à un contre cinq, contre dix, jusqu'à la
fin ?... Toutes les pages de son livre étreignent le coeur.
Pour obtenir des
renseignements elle publie des annonces dans la presse locale. De modestes
lettres lui apportent des précisions :
« Dans ma pâture, - écrit
l'un - il y a un avion et une tombe sans nom dessus. J'ai mis des fis de fer
barbelés pour le respect, à cause des bêtes...»
« Le mercredi avant notre
exode - annonce un autre - il y a un brave aviateur français qui est tombé en
flammes après s'être bagarré tout seul contre douze « Monsieuschmitt ».
« Un avion - dit un
troisième - a fait dans mon blé un atterrissage forcé parce qu'il avait reçu un
obus et qu'il était en flammes. J'ai ramassé des morceaux d'aviateurs que j'ai
« hinumés » près du puits et ma petite met des fleurs dessus chaque jour... »
« Le 7 juin un gros avion
est tombé en plaine. J'ai enterré les ossements carbonisés, mais j'ai trouvé
un, bout d'enveloppe où il y a « Jean » dessus et puis d'autres bouts de
papiers où il y a des chiffres que je sais pas ce que ça veut dire... »
« Lorsqu'on est revenu de
l'exode - précisait un autre correspondant - on a trouvé un aviateur mort dans
la cour de la ferme. Il était tout empêtré dans des cordes. Une fois, un prêtre
qui passait a dit que cet aviateur était un « incognenitau »... Ça devait être
un prêtre parce qu'il avait sur lui trois médailles. Pour le moment nous avons
seulement écrit sur sa croix : Aviateur prêtre incoguenitau mort pour la France
le 20 mai 1940... »
Pauvres lettres
malhabiles... Elles signalèrent ainsi à Mme L'Herbier plus de 300 avions
abattus. Elle vérifia les renseignements, fit creuser pour rechercher les
restes. « II fallait, ajoute-t-elle,
manier ces cadavres. Je ne laissais à personne ce devoir pieux, mais jamais je
ne permis qu'en ma présence une femme assistât à cette horreur sans nom. Je
voulais que les mères et les épouses en deuil gardent intact le souvenir de
leur « vivant ». Combien j'ai enseveli de nos aviateurs, avec tout te respect
dû à leur sacrifice, avec toute ma tendresse, et, comme une mère me le
recommanda « en le prenant bien doucement dans sa tombe ». Ces glorieuses victimes
étaient enfin enterrées dans le cimetière du village, en présence des
autorités. Fréquemment, des gens du village abritaient, dans leurs caveaux de
famille, l'aviateur mort.
On ne retrouvait parfois
qu'une alliance, témoignage d'amour devenu témoignage de mort, une photographie
où s'enroulait une mèche de cheveux...
Qui pourrait lire les
pages de ce livre sans être fier et sans pleurer aussi ?
C'est le pilote du Leo 45
n°122, sergent-chef Gombert, qui est blessé à la tête. Il est aveugle, le sang
ruisselle. Le canonnier Le Guellec s'en aperçoit, dirige la manoeuvre par
téléphone, et, pendant que l'avion brûle, le pilote aveugle exécute les
mouvements...
C'est le célèbre colonel
Dagnoux qui redemande à voler, et disparaît le 18 mai : « Un grand aviateur,
dira de lui le général d'Harcourt, il l'a été dans sa carrière, il l'a été
aussi dans sa mort...»
C'est ce lieutenant, à la
cuisse brisée, trouvé mort, assis le dos contre un arbre, et qui, pendant les
six jours où il attendit vainement du secours, nota son martyre sur son carnet
de route. Ses mains squelettiques serraient encore la photographie de ses
enfants...
C'est Maurice Arnoux,
gagnant de la coupe Deutsch de la Meurthe et de la coupe Zenith, pilote
éblouissant, commandeur de la Légion d'honneur, et qui s'écrase, le 6 juin,
près d'Angivillers.
C'est le capitaine de
Gail, élève au Séminaire des Carmes, qui est tué en combat aérien le 13 mai
1940.
C'est le lieutenant
Pomier-Layrargues qui, avant de mourir vaillamment, contraint à atterrir l'as
allemand Moelders, qui trouvera la mort en 1941 dans un accident d'avion,
totalisant à ce moment 115 victoires...
Il faudrait les citer
tous pour les honorer, ceux du bombardement comme ceux de l'observation, ceux
de la chasse comme ceux de l'aéronautique navale, ou les « rampants » Armée
solide, ardente, fougueuse, qui méritait bien le livre que Mme l'Herbier a
écrit à la mémoire de ses morts. La part de sacrifice de la seule aviation de
chasse fut de 104 pilotes tués, 100 disparus. 158 blessés, ceci pour 40 escadrilles,
soit 400 avions environ. Les pertes de l'aviation non comprises celles de
l'aéronautique navale s'élevèrent à 30 p.100 du personnel navigant. Mme
L'Herbier retrouva 250 avions avec leurs 387 tombes
On peut donc conclure,
après un chaleureux hommage à l'œuvre de Mme L'Herbier, par ces termes extraits
de l'ordre du jour du général d'Harcourt, après l'armistice : « L'aviation de
chasse ( et nous disons l'aviation tout court ) peut être fière de la tâche
accomplie. Il n'a pas dépendu d'elle que les événements trouvent une autre
issue...
Jean PELISSIER
(1) Germaine L'Herbier
Montagnon « Disparus dans le ciel » 1 vol. illustré, 280 pages. Fasquelle,
éditeur, 35 francs.
« DISPARUS DANS LE
CIEL »
Recension parue le mercredi 1er
septembre 1943 dans « Le Journal Des Débats Politiques et
Littéraires »
Existe-t-il un sentiment
plus atroce, plus lancinant que celui de l'incertitude ? Mieux vaut,
semble-t-il, connaître la vérité si brutale qu'elle puisse être, plutôt que de
rester dans l'attente, qu'alternativement espérer et désespérer.
Et pourtant cette
incertitude fut et reste encore le lot dramatique de combien de familles qui
ignorent, souvent, le sort advenu à l'être cher « disparu » depuis la
guerre. Combien de mères et d'épouses se demandent, avec angoisse, si leurs
fils ou maris sont morts ou vivants, et, s'ils sont tombés an champ d'honneur
ou s'ils furent tués, elles ignorent et ne sauront peut-être jamais où se
trouvent leurs tombes sur lesquelles elles pourraient pleurer et prier !
Disparus !...
Or, dans la France du
Nord et de l'Est surtout s'élevèrent et s'élèvent encore, depuis l'armistice,
de très nombreuses sépultures parfois même des fossés entiers qui ne portent
que cette laconique inscription « soldat ou aviateur inconnu ». A travers
ces régions labourées par les obus et les bombes, circulèrent, une fois la
guerre terminée, des ambulances de la Croix-Rouge, portant secours aux
prisonniers enfermés dans des camps improvisés, souffrant la faim, le doute, un
découragement sans nom.
Au nombre des
ambulancières qui les visitaient se trouvait une femme qui, tout en pensant aux
vivants, fut douloureusement surprise de rencontrer, au cours de ses
randonnées, tant de tombes dont les morts restaient inconnus. Et, comme c'est
une femme au grand cœur, elle conçut, en songeant à la douleur des familles des
disparus, un projet grandiose : les identifier. Et Mme Germaine
L'Herbier-Montagnon se consacra corps et âme - c'est le cas de le dire - à
réaliser sa noble idée.
Mais, aviatrice, -elle
appartient, en effet, à l'I.P.S.A. (Infirmières pilotes et secouristes de
l'air), elle limita son activité à la recherche des « Disparus dans le
ciel ». Aujourd'hui,
après deux années d'un travail acharné, ayant eu à vaincre des difficultés sans
nombre et de toute nature, cette femme courageuse nous conte avec une
simplicité et une modestie sans pareilles, le plan méthodique adopté par elle
pour mener à bien la mission qu'elle s'était imposée, les résultats obtenus.
Mme L'Herbier, munie de
la liste des morts, de celle de leurs avions et de leurs équipages, procéda de
la sorte : elle alla en voiture, par le train, à bicyclette et le plus
souvent à pied, retrouver les avions français abattus, reconnaître leur
immatriculation, relever les noms d'aviateurs sur les tombes, identifier les
morts inconnus, procurer à chacun une sépulture décente. Or les morts,
militaires et civils, furent souvent, au cours de la grande panique de l'exode
ou sous les bombardements, enterrés hâtivement souvent, sur ces tombes, ne
figuraient que des inscriptions fantaisistes, d'autres avaient complètement
disparu. Il fallut donc, le plus souvent, exhumer les restes de ces pauvres
morts, chercher auprès d'eux un objet quelconque qui puisse être reconnu par la
famille ou par des camarades vivants, pour permettre ainsi l'identification de
l'aviateur Et ce fut l'intrépide femme qui mania elle-même ces pitoyables
débris « humains ». « Je ne laissai à personne ce droit
pieux », écrit Mme L'Herbier.
C'est ainsi que, petit à
petit, reconstituant l'historique de chaque équipage, elle parvint à
reconstituer simultanément ses derniers combats, ses derniers moments, à
retrouver les traces de ses glorieux morts, à les ensevelir pieusement.
Ce livre constitue donc,
en plus de son côté si profondément humain et unique dans son genre, un
véritable documentaire, précis, net, serré. Tous ceux qui, un jour, voudront
écrire l'histoire des exploits accomplis dans le ciel par nos aviateurs, au
cours de ces tragiques mois de mai-juin 1940 seront obligés d'avoir recours à
l'œuvre de Mme L'Herbier : « Disparus dans le ciel ».
Et maintenant, quel est
le bilan de cette organisation unique en son genre : « Mission de
recherche des morts et disparus de l'armée de l'air », dont Mme L'Herbier
fut le chef ?
On sait que l'aviation française
se heurta à des forces infiniment supérieures. En effet, lorsque commencèrent
les hostilités, l'aviation française comptait, en tout et pour tout, 976
avions, correspondant à un effectif de 2.000 combattants.
Le total général des
pertes de l'armée de l'air, y compris le personnel non navigant, fut de
1 500 morts. Il y eut 2 954 prisonniers.
Or, dans le laps de temps
allant du 10 mai au 10 juin 1940 seulement, les pertes de l'aviation française
furent de 306 avions abattus par l'ennemi, 229 détruits par bombardement, 222
détruits accidentellement ; au total 487 avions représentant 117 tués,
dont 56 officiers, 371 disparus dont 145 officiers, 191 blessés dont 79
officiers.
La mission de Mme
L'Herbier le concernait que les morts et les disparus dont les lieux
d'inhumation étaient ignorés. Or, après deux années de recherches et après
avoir procédé à une centaine d'exhumations, elle finit par identifier 250
avions abattus et 387 morts !
Résultat magnifique et
qui se passe de tout commentaire. L'armée de l'air et les familles ont ainsi
retrouvé, grâce à Mme L'Herbier, leurs morts et leurs disparus. Il ne lui en
manque plus que 29 à rechercher et elle fait, .actuellement, tout ce qu'il est
humainement possible pour parfaire la noble mission.
Mais il faut lire son
livre et cela à un double titre : il est bon, il est réconfortant de
constater, une fois de plus, qu'il existe en France, des femmes admirables de
courage et de cœur comme Mme L'Herbier et ses collaboratrices. Il est également
bon et réconfortant de connaître les exploits héroïques des équipages de France
qui, connaissant pertinemment leurs infériorités numérique et souvent
technique, allèrent stoïquement affronter la mort. Après avoir lu les
« Disparus dans le ciel », personne n'osera plus dire que l'aviation
française n'accomplît pas son devoir. Et ceci est, peut-être, le plus grand
éloge que l'on puise faire à l'auteur de ce remarquable ouvrage.
E. M. MATHEY
MÉMOIRE de GERMAINE L’HERBIER-MONTAGNON
Le
26 juin 2013, alerté par des passionnés de l’aviation à l’initiative de Jean
ROBIN et de Vincent LEMAIRE, alors que la concession de la sépulture de
Germaine L'Herbier-Montagnon était arrivée à expiration, le Conseil municipal
de Tournon-sur-Rhône a attribué à l'unanimité à sa sépulture le caractère d'une
« concession honorifique perpétuelle », permettant ainsi à celle qui
avait tant fait pour assurer à des aviateurs une sépulture digne de leur
sacrifice, de reposer définitivement en paix dans la terre natale qu'elle
chérissait.
Photographie
Claude DANNAU
Mise en page
–
Liens :
Site de
Site de
Voir aussi « Arnould
Thiroux de GERVILLIER » et « Correspondances
de G.L.M. »
(1) Pilote disparu en 1940, pour lequel G.L.M a œuvré après la
découverte de l’épave de son avion en 1941
Site « Halifax Groupes Lourds »
« Il
faut sauver la sépulture de Germaine L’HERBIER-MONTAGNON »